vendredi 30 septembre 2011

Circuit du médicament : acteurs et responsabilités


Le circuit du médicament implique l’intervention de différents acteurs dont le rôle et les responsabilités sont strictement définis. La sécurisation du circuit passe, quant à elle, par la mise en place d’une politique de gestion des risques pro-active et la promotion de l’utilisation des nouvelles technologies.

La sécurisation du circuit du médicament passe par l’application des dispositions de l’arrêté du 11 mars 1999 (1) et le respect des obligations professionnelles incombant aux différents acteurs du circuit.
Ainsi, les responsabilités des divers intervenants en matière d’erreur médicamenteuse sont souvent intriquées, qu’il s’agisse d’un manquement du médecin à son obligation de formuler des prescriptions qualitativement et quantitativement, d’une carence de l’infirmier quant au respect de la prescription, ou encore d’un défaut de contrôle des quantités délivrées par le pharmacien.
Des prescriptions sans examen médical, orales ou incomplètes
Les prescriptions doivent faire suite à un examen médical du malade et être rédigées, datées et signées par le praticien qui les réalise (2). Ainsi, la Cour d’appel de Paris a pu retenir la responsabilité civile d’un médecin gynécologue libéral ayant prescrit un antibiotique à sa patiente sans l’avoir préalablement interrogée sur ses antécédents afin de s’assurer qu’il n’y avait aucune contre-indication.
La patiente fut victime d’une atteinte tendineuse achilléenne bilatérale invalidante avec phénomènes diffus et extensifs aux articulations des quatre membres et du rachis dès le 3ème jour de la prise du traitement par ofloxacine prescrit par le praticien (3).
Par ailleurs, une décision de la Cour d’appel d’Angers a condamné pour homicide involontaire un médecin à la suite de l’administration fatale d’une surdose de sérum glucosé à un enfant ; l’absence de prescription écrite avait ici était retenue à l’encontre du prévenu (4).
Les prescriptions doivent en outre comporter un certain nombre d’éléments listés à l’article R.5132-3 du Code de la Santé Publique (CSP), parmi lesquels des précisions quant aux modes et voie d’administration du produit.
A titre d’exemple, la Cour de cassation a confirmé la condamnation d’un médecin anesthésiste pour homicide involontaire à la suite du décès d’un enfant de 4 ans victime d’un oedème cérébral consécutif à une intoxication par l’eau administrée en trop grande quantité. En l’espèce, le médecin anesthésiste avait commis une négligence en s’abstenant de toute prescription sur le volume, la nature et le débit du liquide à transfuser (5).
Il est par ailleurs à noter que l’engagement de la responsabilité du praticien en raison d’imprécisions dans sa prescription n’exclut pas la mise en cause simultanée de l’infirmier qui n’a pas cherché à obtenir un complément d’information avant d’administrer le produit en cause.
Ainsi, dans une affaire portant sur le décès d’un enfant trouvant son origine dans une erreur de perfusion liée à une mauvaise compréhension de la prescription ; la Cour de cassation a conclu à la responsabilité pénale d’un anesthésiste pour ne pas avoir formulé les prescriptions qu’il donnait à l’infirmière avec toute la clarté indispensable. L’infirmière a, quant à elle, été condamnée pénalement pour ne pas avoir demandé au médecin prescripteur un complément d’information en raison de son incertitude, alors que ses règles de compétences lui en faisait obligation (6).
Une dispensation hasardeuse, sans analyse pharmaceutique
La dispensation est définie dans le Code de la Santé Publique comme l’acte pharmaceutique associant à la délivrance des médicaments, l’analyse pharmaceutique de la prescription, la préparation éventuelle des doses à administrer et la mise à disposition des informations et conseils nécessaires au bon usage du médicament.
A ce titre, « le rôle du pharmacien n’est pas simplement de délivrer un médicament, mais de vérifier si la prescription est conforme » (7).
Le Tribunal administratif de Dijon a ainsi condamné un Centre hospitalier à réparer les préjudices subis par un patient à la suite d’une inversion de médicaments imputée à la PUI (8) de l’établissement (9).
Des administrations erronées ou réalisées sans prescription
Il appartient au personnel infirmier d’appliquer et respecter la prescription médicale écrite par le médecin et de demander au médecin-prescripteur un complément d’information chaque fois qu’il le juge utile (10). Ainsi, la Cour d’appel de Lyon a conclu à la responsabilité civile d’un établissement de santé à la suite du décès d’une patiente hospitalisée pour des bouffées délirantes. Le personnel infirmier avait opéré une confusion entre la forme d’action immédiate et la forme d’action retard du Clopixol® prescrit (11).
Des erreurs du même type peuvent également être sanctionnées pénalement. A titre d’exemple, par un jugement du 22 décembre 2006, le TGI de Chambéry retenait la responsabilité pénale d’un Centre hospitalier en tant que personne morale et d’une puéricultrice de cet établissement à la suite du décès d’un enfant consécutif à une injection d’une double dose de chlorure de sodium à 10 % au lieu du sérum physiologique prescrit.
Notons enfin que la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a pu retenir la responsabilité pénale d’une infirmière qui, bien qu’informée d’antécédents allergiques de la victime et notamment de son intolérance à la Viscéralgine®, a administré, sans prescription médicale, un médicament de ce type, entraînant ainsi le décès de sa patiente (12).
Enfin, par un arrêt du 2 décembre 2008 (13), la Cour de cassation confirme la décision de la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Nancy ayant prononcé le renvoi d’un chef de service et d’un établissement de santé devant le Tribunal correctionnel pour homicide involontaire à la suite du décès d’un patient par intoxication polymédicamenteuse due notamment à l’administration, par le personnel infirmier, de médicaments non prescrits.
La Cour de cassation relève à cet égard qu’il incombait au chef de service, même en l’absence d’autorité hiérarchique directe sur le personnel infirmier, d’organiser et d’assister ce personnel en vérifiant la bonne traçabilité de la circulation et de l’administration des médicaments, le respect des prescriptions, la compréhension claire des décisions des médecins, et le respect de ces décisions.
Fort heureusement, l’ensemble des dysfonctionnements observés autour du circuit du médicament n’ont pas tous un retentissement aussi dramatique. Pour autant, ces illustrations et les difficultés rencontrées quotidiennement par les établissements de santé mettent l’accent sur la nécessaire sécurisation du circuit du médicament par la gestion des risques.
Anne-Sophie MAZEIRAT
Juriste
(1) Arrêté du 11 mars 1999 relatif à la prescription, à la dispensation et à l’administration des médicaments soumis à la réglementation des substances vénéneuses dans les établissements de santé, les syndicats interhospitaliers et les établissements médico-sociaux disposant d’une pharmacie à usage intérieur.
(2) Art. R.4127-76 et R.5132-3 CSP
(3) CA Paris ch 1 sect. B 10/12/99 RG n°1998/08745
(4) CA Angers ch crim. 09/05/96
(5) Cass crim 28/05/97 n°96-83511
(6) Cass. crim 1/04/08 n°07-81509
(7) TGI Sens, 26/11/92
(8) Pharmacie à usage intérieur
(9) TA Dijon 27/03/03
(10) Art. R.4312-29 CSP
(11) CA Lyon ch civ. 1, 30/11/06
(12) CA Aix-en-Provence chbe corr. 7, 14/05/01
(13) Cass. crim. 2/12/08 n° 08-83177
www.sham.fr

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